S’il est une domaine qui attise la convoitise des esprits mercantiles, c’est celui de la perte de cheveux : shampoings surfacturés, techniques “révolutionnaires” sans aucune preuve scientifique, traitements à l’efficacité douteuse… Avec, en plus, l‘invasion de “tours opérateurs” qui annoncent des arguments financiers imbattables. Difficiles pour les patients de faire le bon choix dans ces conditions.
En Turquie, il se fait 1000 greffes par jours dont un bon nombre aux résultats aléatoires. De très bons praticiens font des greffes de qualité, certes, mais il existe aussi nombre d’interventions aux résultats catastrophiques, avec des zones donneuses dévastées, des cheveux qui ne vont que très potentiellement repousser avec de surcroît des phénomènes de kystes et d’infections dermiques… Face à cette concurrence, pour les chirurgiens français qui sont tenu de respecter à la lettre les recommandations du conseil national de l’ordre des médecins (“la médecine ne doit pas être exercée comme un commerce”), il n’y a que la compétence, le bouche à oreille et la réputation pour contrebalancer ce phénomène de tourisme médical où les patients s’en vont dans l’espoir d’avoir un meilleur prix pour une greffe capillaire.
Pour faire le bon choix, le patient doit prendre en compte des arguments qui ne sont pas que tarifaires : le nombre d’implants prévus et leur qualité. Il faut noter que le nombre d’implants capillaires maximum prélevable dans une vie se situe entre 6000 et 7000. De leur qualité dépendra le résultat.
Voici des éléments qu’il faut prendre en considération avant de réaliser une greffe folliculaire.
1 – L’âge du patient
On ne greffe pas avant 25 ans… Même s’il peut être frustrant pour un jeune homme de ne pas avoir accès à la greffe avant cet âge, il s’agit là d’une mesure de protection car l’alopécie peut être parfois fulgurante.
Dans l’état actuel de nos connaissances, les seuls traitements ayant fait indiscutablement la preuve de leur efficacité sont assez peu nombreux en ce qui concerne l’alopécie androgénique masculine. Minoxidil, Finasteride et PRP constituent l’essentiel de notre arsenal thérapeutique.
Avec les traitements médicaux, il ne faut pas perdre de vue que l’on ne peut sauver que les cheveux qui existent encore. Or si un patient est très dégarni à 20 ans et que son père est chauve, il y a peu de probabilité qu’il ne soit pas chauve à 30 ans.
Quel est l’intérêt dans ce contexte de greffer si c’est pour ensuite porter un complément capillaire ou se raser ?
Il faut rappeler cependant que les implants greffés ne tomberont plus. En revanche, les cheveux d’origines risquent de continuer à tomber si l’alopécie n’est pas prise en charge.
2 – La qualité de l’implant
Il s’agit d’un aspect plus subtil car rien ne ressemble plus à un implant qu’un autre implant une fois mis en place. Ce ne sera que lors de la repousse que la différence de qualité apparaîtra.
Pour comprendre cette différence de qualité il faut savoir que la FUE consiste en un prélèvement de l’unité folliculaire (UF). Une UF est composée de 1 à 4 cheveux qui sortent par le même orifice. Or ces cheveux n’ont pas tous la même orientation.
Pour que tous les cheveux soient prélevés lors de l’extraction, il faut que la technique de prélèvement soit irréprochable. Techniquement cela sous entend qu’il faut procéder à un “carottage” suffisamment profond afin de détacher toute la structure. C’est à dire qu’il s’agit sectionner la majeure partie du muscle arrecteur du poil (celui qui lorsqu’il se contracte donne la chair de poule). Il faut détacher également la glande sudoripare et la glande sébacée.
La traction sur l’UF doit être douce également afin de ne pas blesser le bulbe en profondeur.
Si le punch, l’outil de prélèvement, est trop tranchant, il créera des lésions au niveau des follicules prélevés et ceux avoisinant.
Vous l’aurez compris, le but est le prélèvement de l’UF intégrale, sans aucune lésion folliculaire.
Dans les pays où les offres low cost sont répandues, le prélèvement doit être très rapide, incluant un maximum de greffons en un temps record mais bien souvent au détriment de la qualité de ceux-ci. Les follicules sont bien souvent détériorés. Lorsque les greffons sont abimés ou détruits, ils le sont définitivement, c’est une perte sèche et définitive pour le patient.
A noter, un seul chirurgien gère également deux, trois, voire quatre blocs simultanément. Le prélèvement, la préparation des sites de greffe et la mise en place sont confiés à une assistante sans présence du médecin.
Au sein de l’ISHRS (Internationnal Society of Hair and Reconstructive Surgery), dont je suis membre, l’intégralité du prélèvement et l’extraction sont médicales, ce qui explique qu’une seule greffe est possible en une journée.
3 – Le nombre d’implants
Comme évoqué, le nombre maximal d’implants sur une vie est de 6000 à 7000. Mais il ne faut implanter juste que ce qui est nécessaire car il faut penser aux éventuelles futures greffes. L’alopécie androgénique étant évolutive, une greffe pourrait être éventuellement envisagée dans les années futures. Il est important de rappeler au patient que les traitements médicaux doivent être poursuivi car la chute du cheveu non greffé peut reprendre.
En une séance il est possible de prélever 3000 greffons environ. Le nombre est limité car, par souci de cicatrisation, il convient de prélever au maximum 20% à 25% des unités folliculaires de la zone de prélèvement. Un prélèvement supérieur à 4000 greffons laisse une zone de prélèvement très appauvrie, clairsemée, ce qui est absolument à éviter.
La superficie à recouvrir est donc à prendre en considération avant de déterminer le nombre d’implants. Il faut privilégier certaines zones, en accord avec le patient, en cas de grande zone à recouvrir.
En effet la reconstruction de la zone frontale antérieure et de la ligne capillaire antérieure demande souvent plus de 2000 greffons, ce qui en laisse peu pour la tonsure.
En matière de greffe capillaire, la densité de cheveux et l’architecture d’implantation donnée par le chirurgien est plus importante que le prélèvement d’un nombre élevé d’implants. En ce qui concerne la densité capillaire et donc le pouvoir occultant de la peau du cuir chevelu, on considère qu’au dessus de 45 cheveux par cm2, le cuir chevelu est peu visible.
Les paramètres de camouflage du cuir chevelu sont : le diamètre des tiges capillaires, leur densité, leur couleur, l’orientation vectorielle et la forme du cheveu.
Les cheveux épais, bruns, frisés, de densité supérieure à 45 cheveux/cm2 ne donnent pas l’impression de manque de cheveux. En revanche les cheveux fins, blonds, raides, même à plus de 50 cheveux/cm2 laissent souvent voir la peau du crâne. Il faudra donc mettre beaucoup plus de greffons pour obtenir un résultat équivalent. On comprend donc pourquoi les résultats, en image, sont plus probants pour les chirurgiens en Turquie (cheveux épais, noirs, ondulés, avec une grande zone donneuse) qu’en Suède ou en Finlande où les patients sont blonds avec les cheveux fins.
Un autre facteur est la différence du nombre de cheveu par UF. Les UF sont composées de 1 à 4 cheveux, la moyenne est de 2,2.
Le bon résultat n’est donc pas uniquement du fait du chirurgien capillaire mais la qualité de la zone donneuse entre pour beaucoup dans le résultat final.
4 – La zone à recouvrir
Les zones à recouvrir ne sont pas toutes demandeuses de la même qualité d’implant pour obtenir le même résultat. La plus “gourmande” est la zone de la tonsure, ou vertex, car à ce niveau, les cheveux sont implantés quasi verticalement avec une orientation vectorielle aux formes d’une galaxie. Cela explique qu’il est naturel de voir le crâne à cet endroit. La reconstruction d’une telle zone est très particulière, car les techniques sont nombreuses mais pas satisfaisantes en dehors de la technique de colimaçon.
La zone à recouvrir doit vraiment tenir compte de l’âge du patient : l’alopécie étant évolutive, il faut veiller à prévoir sa progression pour éviter d’isoler de façon très artificielle des cheveux implantés trop bas.
La dispersion et la répartition aléatoire sont également importantes car il est fondamental de changer d’inclinaison des cheveux, plus penchés en avant qu’au dessus du crâne et intercalés au maximum pour éviter l’effet forêt de peuplier ou l’existence d’un dessin parfaitement géométrique, signe de manque d’expérience dans le domaine de la greffe.
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